Alerte économique circulaire et discipline R.E.P.

La mise sur le marché français de nombreux types de produits impose des restrictions visant à réduire la quantité de déchets.

La mise sur le marché français de nombreux types de produits impose au distributeur de respecter des obligations strictes visant à réduire la quantité de déchets, à l’accroissement de l’activité de recyclage et/ou à la réutilisation des mêmes produits proposés au consommateur français. Outre les amendes administratives, des sanctions pénales peuvent aller jusqu’à deux ans d’emprisonnement.

Voici une synthèse des principaux aspects de cette réglementation.

1. NOTIONS DE BASE

Au niveau communautaire, la directive-cadre 2008 sur les déchets nº 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008, modifiée par la directive (UE) 2018/851 du 30 mai 2018, représente l’instrument de référence qui a défini et dicté les objectifs que chaque législateur national avait l’objectif de poursuivre en intégrant, dans une période donnée, des dispositions appropriées dans son ordre juridique.

Refus (déchet) : art. L.541-1-1 Code de l’environnement (code de l’environnement)

Toute substance ou tout objet, ou plus largement tout bien meuble, dont le détenteur se défait ou dont il a l’intention ou l’obligation de se défaire.

La logique à la base de la R.E.P. (responsabilité élargie du producteur) est codifiée à l’article L.541-10 du code de l’environnement français : toute personne fabriquant en France ou importie/ou distribuant sur le territoire français (notion étendue de 'mise sur le marché') a l’obligation de contribuer ou d’assurer la gestion des déchets résultant du produit proposé à la consommation en France. 

Les objectifs poursuivis par le législateur européen et complétés par le législateur national français essentiellement dans le code de l’environnement sont multiples, tous corollaires du paradigme "RÉDUIRE - RÉUTILISER - RECYCLER" :

  • réduire la quantité de déchets à éliminer;
  • responsabiliser le producteur afin qu’il ne produise pas inutilement des déchets (donc qu’il soit encouragé à abandonner les logiques sous-jacentes à l’obsolescence programmée, qu’il conçoive des produits aptes à être réutilisés et/ou recyclés, etc.);
  • éduquer le citoyen - consommateur à une logique de respect de l’environnement, de réutilisation et de recyclage.

2. FILIÈRES DE PRODUITS RÉGLEMENTÉS EN FRANCE

Les filières de produits soumises à la réglementation R.E.P. sont énumérées à l’article L.541-10-1 du Code de l’environnement qui en prévoit 22, parmi lesquelles : 

  • emballages
  • textiles, chaussures et linge de maison (c.d. filière TLC)
  • déchets d’éléments d’ameublement
  • articles de sport
  • cartes imprimées
  • jouets
  • piles et accumulateurs
  • pneumatiques
  • articles de jardinage ou de bricolage
  • les médicaments, les dispositifs médicaux perforants et les textiles sanitaires jetables.

La date d’entrée en vigueur de la réglementation contraignante n’est pas identique pour toutes les filières actuellement réglementées et varie en fonction des catégories de produits et du type d’obligations définies normativement.

3. LE PRODUCTEUR DESTINATAIRE DES OBLIGATIONS ET SANCTIONS PRÉVUES DANS L’ENCADREMENT R.E.P.

Aux fins de la réglementation R.E.P., la notion de "Producteur" est très étendue : est assimilé à toute personne qui développe, fabrique, manipule, traite, vend ou importe des produits et/ou des éléments et matériaux générant des déchets.

Lorsque les produits sont revendus sous la marque d’un revendeur, ce dernier est considéré comme un producteur aux fins de l’encadrement R.E.P.

Market-place et les autres acteurs du e-commerce sont tenus de respecter toutes les obligations découlant de la vente des produits destinés au marché français, à moins qu’ils ne soient en mesure de prouver que le Fabricant concerné y a déjà satisfait.

4. OBLIGATIONS DU PRODUCTEUR

Parmi les nombreuses obligations qui pèsent sur les Producteurs, signalons les principales:

  • obligations déclaratives et d’information;
  • obligations en matière de réduction, de gestion, de recyclage ou de réutilisation des déchets;
  • obligations en matière d’étiquetage;
  • obligations propres au sort des invendus de production.

Pour s’acquitter de ces obligations, le Producteur est tenu :

  • à adhérer à l’éco-organisme compétent pour la filière de produits le concernant;
  • à définir et à structurer son propre système individuel de collecte et de traitement des déchets provenant des produits qu’il a mis sur le marché.

Dans les deux cas, le Producteur doit obtenir un numéro d’identification unique (NUI) pour chaque typologie de produits relevant d’une filière réglementée. l’IUN doit être indiqué sur le site Internet et sur les conditions générales de vente du Producteur; sinon, sur la documentation contractuelle communiquée à l’acheteur.

4.1 Obligations déclaratives et d’information

L’organisme (ou le producteur ayant opté pour un système individuel de collecte et de gestion) fournit à l’autorité administrative :

  • des données quantitatives et qualitatives sur les produits mis sur le marché national ainsi que des informations sur les mesures prises pour limiter et gérer de manière vertueuse la quantité de déchets générés;
  • données relatives au taux d’incorporation de matériaux recyclés dans les produits commercialisés en France;
  • les données relatives aux modalités de gestion des déchets;
  • des données relatives à la surveillance et à la détermination des objectifs quantitatifs et qualitatifs en matière de prévention et de gestion des déchets.

4.2 Obligations en matière de réduction, de gestion, de recyclage et de réutilisation des déchets

Le producteur, dans le cadre de l’encadrement R.E.P. doit notamment :

  • de prendre ou de contribuer à la prévention et à la gestion des déchets résultant de l’utilisation et de la consommation des biens commercialisés en France; 
  • concevoir et concevoir leurs produits de manière écologique;
  • promouvoir et soutenir l’allongement de la durée de vie des produits qu’il commercialise; 
  • soutenir les réseaux de réutilisation et de réparation; 
  • contribuer à des projets de développement et de soutien à la collecte et au traitement des déchets; 
  • développer des techniques et des canaux de recyclage.

4.3 obligations en matière d'étiquetage

a) Informations sur les qualités et les caractéristiques environnementales du produit

Le Fabricant doit communiquer - par marquage, étiquetage, exposition ou tout autre procédé approprié les qualités et les caractéristiques environnementales des produits destinés à la consommation en France (incorporation de matériaux recyclés, utilisation de ressources renouvelables, durabilité, compostabilité, réparabilité, réutilisabilité, recyclabilité, ...).

Le Producteur doit également mentionner les primes ou pénalités liées au calcul de son Eco-contribution (ci-après).

Les informations doivent être visibles ou accessibles au moment de l’achat, ainsi qu’à la mise à disposition du public sous forme numérique.

Lorsqu’il est interdit d’utiliser certaines mentions, d’autres sont obligatoires :

  • les produits en plastique et les emballages dont la compostabilité ne peut être obtenue que dans une unité industrielle ne peuvent pas être étiquetés comme 'compostables';
  • les produits en plastique et les emballages qui ne peuvent être compostés que pour le compostage domestique ou industriel doivent porter la mention "ne pas éliminer en nature";
  • lorsque le caractère 'recyclé' d’un produit est mentionné, le pourcentage de matériaux recyclés effectivement incorporés doit être précisé;
  • il est interdit d’apposer la mention 'biodégradable', 'respectueux de l’environnement' ou toute autre mention ayant un effet équivalent sur le consommateur.

b) L'info tri

Les produits appartenant à l’une des filières énumérées à l’article L.541-10-1 du code de l’environnement doivent porter une signalisation informant le consommateur des règles de collecte séparée.

Outre le logo "triman", la signalisation apporte des informations spécifiques concernant les modalités de collecte ou de restitution de chaque élément composant le produit, si celles-ci suivent des modalités de collecte distinctes.

Ces indications figurent sur le produit, sur son emballage ou, à défaut, sur les documents fournis avec le produit. 

4.4 Obligations en matière d’invendus non alimentaires

La destruction des invendus non alimentaires est interdite : ceux-ci doivent être recyclés, réutilisés, donnés à des associations de lutte contre la précarité et aux structures de l’économie sociale et solidaire qui bénéficient de la reconnaissance 'entreprise solidaire d’utilité sociale'.

Les invendus faisant l’objet de tels dons permettent au Producteur de bénéficier d’un crédit d’impôt proportionnel à la valeur donnée.

4.5 Adhésion à l’organisme

Dans le cas où le Producteur opte pour l’adhésion à un éco-organisme, celui-ci remplit toutes les obligations applicables à sa filière de compétence à la place du Producteur lui-même.

Pour financer l’activité des éco-organismes, chaque adhérent doit verser une éco-contribution fixée par l’éco-organisme après approbation ministérielle. Cette contribution est modulée selon des critères de performance environnementale, tels que l’incorporation de matériaux recyclés, l’utilisation de ressources renouvelables gérées de manière durable, la durabilité, la réparabilité, les possibilités de réutilisation, la recyclabilité...

La modulation prend la forme d’une prime lorsque le produit est satisfaisant ou d’une sanction lorsqu’il n’est pas performant selon les critères indiqués ci-dessus. Les primes et les pénalités peuvent être supérieures au montant de la contribution financière requise pour la gestion des déchets. 

Le montant de la subvention est calculé sur la base des ventes annuelles N-1 du fabricant.

Remarque : l’adhésion à un éco-organisme implique la régularisation du montant dû pour les trois exercices précédant celui de l’adhésion (l’obligation d’écocontribution est en vigueur depuis 2007 et la prescription administrative est de trois ans).

4.6 Création d’un système individuel de collecte et de gestion des déchets

La création d’un système individuel de collecte et de traitement des déchets comme alternative à l’adhésion à un éco-organisme impose au Producteur de remplir de nombreux critères et conditions afin d’obtenir l’accréditation du Ministère compétent.

En particulier, il est nécessaire que ses produits portent un marquage permettant l’identification de leur origine et garantissant la restitution gratuite des déchets en tout point du territoire national français accompagnés si cela permet d’améliorer l’efficacité de la collecte - par une prime de restitution pour prévenir l’abandon des déchets; dans ce cas, le Producteur doit également disposer d’une garantie financière en cas de défaillance.

Le Producteur doit également contribuer au financement des coûts de réparation des produits achetés par les consommateurs français ainsi que de ceux visant à permettre leur réutilisation ou leur réutilisation. À cette fin, le système individuel doit disposer d’un fonds dédié au financement de ces opérations.

En ce qui concerne la procédure d’approbation du système individuel :

  • la demande d’approbation d’un système individuel doit inclure des mesures prévues pour atteindre les objectifs en matière de gestion et de collecte des déchets;
  • le système individuel peut être approuvé par le ministère de l’environnement pour une période maximale de six ans renouvelable. Le silence de l’administration quatre mois après le dépôt de la demande vaut approbation;
  • des audits indépendants sont effectués au moins tous les deux ans afin d’évaluer la gestion financière du système individuel, la quantité des données collectées et communiquées et la couverture des coûts de la gestion des déchets;
  • Sauf exception, les objectifs applicables aux systèmes individuels sont équivalents à ceux fixés pour les éco-organismes compétents pour la même catégorie de produits.

5. Sanctions

Le "Code de l’environnement" prévoit différents types de sanctions, y compris de nature pénale, en cas de non-respect de la réglementation R.E.P.

En premier lieu, il est prévu une procédure de comminatoire qui, à l’initiative du Ministère de l’Environnement, a le but de mettre un terme aux accomplissements des sujets tenus aux obligations REP. Cette procédure prévoit - sommairement - les sanctions suivantes :

  • à l’issue d’une procédure contradictoire, le ministère de l’environnement peut infliger, par décision motivée, une sanction administrative dont le montant ne peut excéder, par unité ou par tonne de produit, 1.500 euros par personne physique et 7.500 euros par personne morale;
  • une pénalité journalière peut également être infligée, dont le montant ne peut excéder 20000 euros, jusqu’à ce que les mesures prescrites pour remédier aux manquements du Producteur aient été respectées; 
  • le refus de communiquer les informations demandées par le ministère de l’environnement peut conduire à une peine d’emprisonnement de deux ans et au paiement d’une amende de 75.000€;
  • le défaut d’inscription dans les registres de contrôle (et donc le fait que le producteur ne dispose pas d’une IUN), l’omission des obligations déclaratives, la communication de données erronées ou l’absence de publication de l’IUN sur la documentation obligatoire, peut entraîner une sanction administrative ne dépassant pas 30000 €.

Sont passibles d’une sanction autonome (indépendamment de la procédure précitée) : 

  • la violation des obligations en matière d’étiquetage info-tri : sanction administrative jusqu’à 3000 euros pour une personne physique et 15000 euros pour une personne morale;
  • la violation des obligations de gestion des invendus non alimentaires : sanction administrative jusqu’à 3000 € pour une personne physique et 15000 € pour une personne morale.

Outre la procédure et les sanctions décrites, le producteur qui met en place son propre système individuel de collecte et de gestion des déchets peut faire l’objet d’une procédure de sanction spécifique lorsque certaines infractions ou manquements sont constatés en ce qui concerne le fonctionnement dudit système : 

  • sanction administrative déterminée en fonction de la gravité des infractions constatées, jusqu’à concurrence de 10 % du montant annuel du budget estimé dans la demande d’approbation du système individuel;
  • la publication, la diffusion ou la divulgation de la décision ou d’un extrait de celle-ci aux frais de l’intéressé;
  • remise d’une somme correspondant au montant des mesures nécessaires pour se conformer aux mesures prescrites, qui peuvent être exécutées d’office par le ministère compétent à la place de la personne mise en demeure et aux frais de celle-ci;
  • une pénalité journalière d’un montant pouvant aller jusqu’à 20000 euros jusqu’à la réalisation des mesures prescrites ou jusqu’à la réalisation des objectifs de prévention et de gestion des déchets;
  • suspension et retrait de l’approbation du système individuel.

Par ailleurs, toutes les sanctions sont rendues publiques (L.541-9-8 code environnement).

 

cOntactez nous 

 

Un article de Filippo SARTOR et Tommaso CIGAINA

Avocats Membres GIE ONZE CENT TROIS RCS Paris 888 755 857

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